France : le viol désormais défini par l’absence de consentement

France : le viol désormais défini par l’absence de consentement L’Assemblée nationale a adopté à une large majorité une réforme historique du Code pénal : la définition du viol reposera désormais sur l’absence de consentement, et non plus uniquement sur la violence, la contrainte, la menace ou la surprise. Ce changement, longtemps attendu, marque une évolution majeure du droit français et de la compréhension sociale des violences sexuelles.

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11/9/20253 min read

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France : le viol désormais défini par l’absence de consentement

L’Assemblée nationale a adopté à une large majorité une réforme historique du Code pénal : la définition du viol reposera désormais sur l’absence de consentement, et non plus uniquement sur la violence, la contrainte, la menace ou la surprise. Ce changement, longtemps attendu, marque une évolution majeure du droit français et de la compréhension sociale des violences sexuelles.

Une conception héritée du XIXᵉ siècle

Jusqu’à présent, la loi française exigeait la preuve d’une forme de violence ou de contrainte pour reconnaître un viol. En pratique, cela excluait de nombreux cas où la victime était tétanisée, sous emprise ou dans l’incapacité de dire non.
L’absence de consentement ne suffisait pas : il fallait démontrer une contrainte tangible, souvent au prix d’une remise en question de la parole des victimes.

Cette conception ancienne reposait sur une idée implicite : qu’une victime « réelle » devait se débattre ou résister physiquement. Les chercheurs en psychologie ont pourtant montré depuis longtemps que, face à la peur ou au choc, le corps peut se figer. Ce phénomène de sidération traumatique, désormais reconnu, rend impossible toute réaction, même verbale.

Le consentement au cœur de la définition

La réforme, portée par les députées Marie-Charlotte Garin et Véronique Riotton, introduit une nouvelle rédaction de l’article 222-23 du Code pénal : « Constitue un viol tout acte de pénétration sexuelle commis sans le consentement libre et éclairé de la personne. »

Le texte précise que le silence ou la passivité ne valent pas accord, et que le consentement doit être libre, spécifique, informé et réversible. Les notions de violence ou de contrainte demeurent dans la loi, mais deviennent des circonstances aggravantes, non plus des conditions nécessaires pour qualifier un viol.

Ce basculement aligne la France sur la plupart de ses voisins européens – la Suède, l’Espagne ou l’Allemagne – qui ont déjà adopté une approche dite « consent-based », fondée sur la liberté de dire oui ou non.

Une réponse à des affaires emblématiques

Le débat s’est accéléré à la suite du procès Pelicot, en 2024. Gisèle Pelicot, droguée et violée à répétition par des dizaines d’hommes à l’insu de son mari, avait révélé les failles du système judiciaire : en l’absence de violence visible, la qualification de viol reposait sur des critères difficilement applicables.
Ce drame a contribué à mettre en lumière la nécessité d’une réforme centrée sur la notion de consentement et non sur celle de la contrainte.

Une avancée juridique, psychologique et symbolique

Pour les associations de victimes comme pour les professionnels de santé mentale, cette réforme constitue un changement de paradigme.
Elle déplace la charge de la preuve : il ne s’agit plus de démontrer que la victime s’est débattue, mais de déterminer si elle a librement consenti à l’acte. Sur le plan psychologique, cette reconnaissance permet de valider des vécus longtemps minimisés. Le texte, en redéfinissant la notion de viol, reconnaît implicitement les mécanismes de domination, de sidération et d’impuissance psychique à l’œuvre dans de nombreuses situations de violence sexuelle.

Former, accompagner, prévenir

Les juristes comme les cliniciens s’accordent : le vote de la loi ne suffira pas.
Encore faut-il former les magistrats, les policiers, les médecins et les psychologues à cette nouvelle conception du consentement. L’enjeu est aussi culturel : comprendre que la sexualité ne peut exister que dans la liberté partagée et que l’absence de refus n’est pas un accord.

La réforme s’inscrit dans un mouvement plus large, porté par la société civile, les chercheurs et les praticiens du psychisme : faire du respect, de l’écoute et de la conscience du corps des piliers de la relation humaine.

Une nouvelle culture du respect

Au-delà du droit, cette évolution consacre une idée fondamentale : le viol ne se mesure plus à la violence, mais à la perte de liberté. Le consentement devient le critère central, à la fois juridique, éthique et humain.
C’est un tournant dans la manière dont la société française conçoit la sexualité, la responsabilité et le respect de l’autre.